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mercredi 19 juin 2013

L'Innocence et le Repentir




L'innocence, dit-on, perdit sa blanche robe;
Quand elle vient à s'endormir,
La volupté parfois la lui dérobe;
Confuse et ne pouvant plus se voir sans rougir,
Dès le même jour, l'innocence
Vient la redemander, mais sans rien obtenir,
Au travail, à l'aumône, au jeûne, à l'abstinence.
Un seul put la lui rendre, et c'est le repentir.

lundi 17 juin 2013

Nul n'est triomphant !




Nul n'est heureux et nul n'est triomphant.
L'heure est pour tous une chose incomplète ;
L'heure est une ombre, et notre vie, enfant,
     En est faite.

Oui, de leur sort tous les hommes sont las.
Pour être heureux, à tous – destin morose ! –
Tout a manqué. Tout, c'est-à-dire, hélas !
     Peu de chose.

Ce peu de chose est ce que, pour sa part,
Dans l'univers chacun chercher et désire :
Un mot, un nom, un peu d'or, un regard,
     Un sourire !

La gaîté manque au grand roi sans amours,
La goute d'eau manque au désert immense.
L'homme est un puits où le vide toujours
     Recommence.

Victor Hugo, Les Contemplations.

lundi 27 mai 2013

A la douleur en proie...





Élève ta pensée aux cieux, 
Âme immortelle, à la douleur en proie, 
Et même en gémissant tu goûteras la joie. 
Elle se révèle à tes yeux 
De l'auteur de tous biens la sagesse profonde.
La douleur fut donnée au monde 
Afin d'engendrer la vertu. 
C'est dans ce rude apprentissage,
Que, bien loin d'en être abattu, 
S'instruit, se fortifie et s'élève le sage.

lundi 13 mai 2013

Les Hiboux





Sous les ifs noirs qui les abritent
Les hiboux se tiennent rangés,
Ainsi que des dieux étrangers,
Dardant leur œil . Ils méditent.

Sans remuer ils se tiendront,
Jusqu'à l'heure mélancolique
Où; poussant le soleil oblique,
Les ténèbres s'établiront.

Leur attitude au sage enseigne
Qu'il faut en ce monde qu'il craigne
le tumulte et le mouvement ;

L'homme ivre d'une ombre qui passe
Porte toujours le châtiment
D'avoir voulu changer de place.

Charles Baudelaire

samedi 11 mai 2013

Restauration par la famille




La famille aujourd'hui c'est tout ce qui nous reste
Pour fermer de nos maux la blessure funeste.
Ce n'est point par l'épée que nos enfants vaincront,
Mais par le signe auguste imprimé sur leur front.
Faites-nous des sauveurs et non des tueurs d'hommes ;
Donnez-nous ce qui manque à l'époque où nous sommes,
Des chastes et des forts et de vaillants esprits
Sachant devant l'athée acclamer Jésus-Christ.
Donnez-nous des lutteurs retenant à distance
Tous ces efféminés, fruit de la décadence,
Et ravivant partout les mâles souvenirs
Que des monts vénérés nous envoient des martyrs ;
La France alors, rendue à sa verdeur première,
Échappant à la nuit, marchant à la lumière,
Pour l'élever au ciel, où sont ses vrais destins,
Comme autrefois Monique, aura ses Augustins.
Sortez d'ici, bons fils, bons parent et bons frères,
Amis des plaisirs purs, des croyances sévères ;
Dans l'Église et l'État gardez votre unité,
Bon citoyens du temps et de l'éternité.
De la Sainte-Famille adoptions les trois fêtes,
Ces trois haltes pour vous et le bien que vous faites,
De Marie à Joseph, de Joseph à Jésus,
Vous mènent par étape au séjour des élus. 

M. Claudius Hébrard

mercredi 8 mai 2013

Dilemme





Vraiment c'est incroyable (et c'est bien affligeant) !
Comme le cœur se perd dans notre siècle, et comme
Nous avons pris pour Dieu la matière et l'argent !
Je m'en rapporte à vous, combien de fois en somme
Vous a-t-on dit, mon cher, que quelqu'un était bon ;
En revanche combien de fois qu'il était riche ?
Vante-t-on la vertu ? vous savez bien que non !
La fortune, voilà, partout, ce qu'on affiche.
Je voudrais être un peu moins misanthrope, mais
J'entends autour de moi : beau cheval ! belle femme !
C'est-à-dire beau corps ! jamais, au grand jamais,
Je n'entends ces deux mots, si doux pourtant : belle âme !
Ce dilemme dès lors ne peut être évité ;
Il s'impose implacable, absolu, nécessaire :
Ou nous ne savons plus comprendre la bonté,
Ou bien nous n'avons plus d'âmes bonnes sur terre.

Paul COLLIN

vendredi 12 avril 2013

Terre natale




Voilà le banc rustique où s'asseyait mon père,
La salle où résonnait sa voix mâle et sévère
Quand les pasteurs, assis sur leurs socs renversés
Lui comptaient les sillons pour chaque heure tracés...
Voilà la place vide où ma mère à toute heure,
Au plus léger soupir sortait de sa demeure,
Et, nous faisant porter ou la laine ou le pain,
Vêtissait l'indigence ou nourrissait la faim...
Voici l'étroit sentier où, quand l'airain sonore
Dans le temple lointain vibrait avec l'aurore,
Nous montions sur sa trace à l'autel du Seigneur
Offrir deux purs encens, innocence et bonheur !
Voilà le peuplier qui, penché sur l'abîme,
Dans la saison des nids nous berçait sur sa cime,
Le ruisseau dans les près, dont les dormantes eaux
Submergeaient lentement nos barques de roseaux,
Le chêne, le rocher, le moulin monotone,
Et le mur au soleil où, dans les jours d'autone,
Je venais, sur la pierre assis près des vieillards,
Suivre le jour qui meurt de mes derniers regards...
Mais, hélas ! l'heure baisse et va s'évanouir !
La vie a dispersé, comme l'épi sur l'aire,
Loin du champs paternel les enfants et la mère, 
Et ce foyer chéri ressemble aux nids déserts
D'où l'hirondelle a fui pendant de longs hivers !







Bientôt peut-être... Écarte, ô mon Dieu, ce présage !
Bientôt un étranger, inconnu du village,
Viendra l'or à la main, s'emparer de ces lieux
Qu'habite encor pour nous l'ombre de nos aïeux,
Et d'où nos souvenirs des berceaux et des tombes
S'enfuiront à sa voix, comme un nid de colombes
Dont la hache a fauché l'arbre dans les forêts,
Et qui ne savent plus où se poser après !
Ne permets pas, Seigneur, ce deuil et cet outrage !
Ne souffre pas, mon Dieu, que notre humble héritage
Passe de main en main traqué contre un vil prix,
Comme le toit du vice ou le champ des proscrits !
Qu'un avide étranger vienne d'un pied superbe
Fouler l'humble sillon de nos berceaux sur l'herbe,
Dépouiller l'orphelin, grossir, compter son or
Aux lieux où l'indigence avait seule un trésor,
Et blasphémer ton nom sous ces mêmes portiques
Où ma mère à nos voix enseignait tes cantiques !

Lamartine

vendredi 15 mars 2013

O sol salutis, intimis...




O Soleil de salut, ô Jésus !
Brillez à l'intime de nos cœurs,
Tandis que chassant la nuit, plus gracieux,
Renaît le jour à notre monde.

Nous donnant un temps de faveur,
Donnez-nous des ruisseaux de larmes,
Pour laver l'hostie du cœur,
Que brûle une joyeuse charité.

De la source d'où coula le crime,
Ils couleront éternels, les pleurs,
Si la verge de pénitence,
De notre cœur, broie la dureté.

Le jour viendra, votre jour à Vous,
Dans lequel tout reverdira.
Que sa joie soit nôtre, au chemin
Où nous a ramenés votre droite.

Qu'inclinée, la machine du monde
Vous adore, clémente Trinité
Et nous, renouvelés par la grâce,
Chantons un cantique nouveau. 

Ainsi soit-il.

Hymne des Laudes pour le temps du Carême.

vendredi 21 décembre 2012

La complainte du Templier




1* C'était au mois de mai que je fus adoubé
En la commanderie de Montigny l'Allier
En ce clair jour ma joie ne se put comparer
Qu'à celle des amants qui ont le cœur comblé

2* Quand je reçus de l'ordre la cape immaculée
Marquée de la croix rouge, à l'épaule brodée
Le grand maître, céans, a daigné me parler
« sois fidèle et ardent car tu es TEMPLIER »

3* Depuis sur terre et mer nous avons guerroyé
Partout dans le désert sous le ciel mordoré
Des sarrasins maudits je me suis fait connaître
Comme un vrai chevalier seul mérite de l'être

4* Combien de missions menées jusqu'à leur terme
Combien d'engagements qui l'ennemi consternent
Par le fer de la lance au baucéant sacré,
De Syrie en Provence, j'ai servi Chrétienté !

5* Or aujourd'hui enfin me voici allongé
Dans de la paille fraîche où j'entends psalmodier
Là- haut, dans la chapelle, c'est l'office des morts
Courage, Dieu t'appelle, tu arrives au port.

6* O lointaine Champagne pays de mes aïeux
Ton ciel ennuagé m'a bien manqué un peu
Sous le firmament bleu et le ciel étoilé
Qu'on voit toute l'année au Crac des Chevaliers

7* Sur mon honneur, Seigneur, j'ai Votre foi jurée,
Je Vous rends mon cœur pur et mon épée sans tâche
J'ai combattu pour Vous sans repos ni relâche,
Je Vous rends mon épée avec son baudrier

8* Sire Dieu protégez ce pays qui est Vôtre
Vous y marchiez jadis suivi de Vos apôtres
J'ai parcouru ses routes et suivi ses sentiers
J'ai chevauché sans doute où Vous posiez le pied .

9* La route qui s'achève mène au paradis
Saints et Saintes de Dieu, aidez moi en ce jour
Saint Georges et saint Maurice qu'il ne soit jamais dit
Que vous m'avez laissé privé du Dieu d'amour

10* Sire Dieu de Merci, Sire Dieu de bonté
Dans mon cœur pour un autre il n'y eut jamais place
Grâce ô agneau de Dieu qui toute faute efface
Grâce Dame Marie à qui l'Ordre est voué


mercredi 24 octobre 2012

L'Orpheline à la Sœur supérieure




     Le bon Dieu m'a repris ma mère !
Oh ! ma douleur alors fut bien amère,
     Et rien ne pouvait la calmer;
     Car, dans mon berceau solitaire,
Je disais en pleurant : Je n'ai plus sur la terre,
Non, je n'ai plus plus personne à présent pour m'aimer !
Je suis toute petite, et faible, et si timide !
Et je n'ai plus d'appui, plus d'ami, plus de guide !
Seule dans la maison, seule sur le chemin,
A la triste orpheline, à l'enfant délaissée,
Qui donnera des soins, des caresses, du pain ?...
Oh ! ma mère, en partant pourquoi m'as-tu laissée !...
Mais tout à coup, du ciel, vers moi tendant la main,
     Je vis descendre un ange de lumière,
Mon bon ange peut-être, ou celui de ma mère :
Son sourire était plein d'amour et de douceur ;
Son front resplendissait de grâces immortelles ;
Il me prit dans ses bras, me pressa sur son cœur,
Comme un ramier céleste, il déploya ses ailes,
     Et puis, d'un vol rapide et doux,
     Vint me poser sur vos genoux...
Moi d'abord, j'eus grand' peur. La surprise et la crainte
Faisaient couler mes pleurs et redoublaient ma plainte.
Mais quand, sur votre sein, dans vos bras caressants
Je me dis : C'est ma mère ! Oh ! je l'ai reconnue !
Aux cris de son enfant, la voilà revenue !
Ce ne sont plus ses traits, son visage chéri,
Mais voilà bien ses yeux qui toujours m'ont souri;
Sa voix redit mon nom, son regard me caresse...
Mère ! oh ! j'ai retrouvé ton cœur et ta tendresse !
Souvent je pleure encore, et quand, pour m'apaiser,
Vers mon front votre bouche en souriant s'incline,
     Je sens bien sous votre baiser,
     Que je ne suis plus orpheline.


Auteur inconnu

lundi 22 octobre 2012

Sonnet de sainte Thérèse




Ce qui fait, ô mon Dieu ! que mon âme s'élance
Ardemment jusqu'à toi, sans cesse, chaque jour,
Non, j'ose l'affirmer, ce n'est point l'espérance
De l'immense bonheur promis à notre amour.

Ce qui fait que je crains d'oublier la défense
De laisser le péché pénétrer dans mon cœur,
De commettre envers toi la plus légère offense,
Ce n'est point la frayeur de l'éternel malheur.

Non, non, c'est de te voir, l'œil mourant, le front blême,
Attaché sur la croix, buvant le fiel amer,
Le corps ensanglanté, transpercé par le fer.

Oh ! mortelle agonie ! oh ! dévouement suprême !
Je te craindrais, mon Dieu, ne fût-il pas d'enfer,
Et point de paradis, je t'aimerais de même.

jeudi 30 août 2012

Montjoie !




Celui qui ne se battra pas avec l'épée se battra par la prière ! Rien ne doit nous décourager.


Que le Très Saint Sépulcre
Soit notre sauvegarde !
C'est au Nom du Très-Haut
Que nous sommes sur l'eau
Qu'Il nous accorde sa grâce,
Qu'Il nous donne sa force !

Bénis soient la lumière
Et la Sainte-Croix,
Le Seigneur de la Vérité
Et la Sainte Trinité.

Bénis soient notre âme
Et le Seigneur qui nous la donna,
Bénis soient le jour
Et le Seigneur qui nous l'envoie.




  


Nous, les Francs, nous sommes les soldats du Christ !
Pour Lui, nous avons tout quitté : pays, biens, amis, amours, maisons, souvenirs... sans autre contrepartie que l'honneur de Le servir. Nous méprisons l'argent et ses séductions. Nous ne voulons avoir d'autre intérêt que celui de la cause de Dieu !

Saint Sépulcre ! Jérusalem !
Montjoie ! Montjoie !




dimanche 15 juillet 2012

Le Dimanche au village




La cloche dans les airs tinte, et sa voix d'airain
Semble dire et redire : « Accourez, c'est dimanche. »
Garçons en beaux habits, filles en robes blanches
Se hâtent vers l'église et couvrent le chemin.

Après la messe on sort, on se donne la main :
Quand on a bien prié, le cœur joyeux s'épanche,
La soif d'une semaine en une heure s'étanche,
Et le jour passe vite innocent et serein.

De tous les saints amours se raniment la flamme ;
Le corps, las du travail, cède le pas à l'âme ;
Heureux arrangements pour l'âme et pour le corps.
Ils font provisions, pour la semaine entière,
L'un de vigueur nouvelle, et l'autre de prière.
Ô Dimanche, c'est toi qui fait les peuples forts.


Anatole de Ségur

dimanche 8 juillet 2012

Pater noster...




PRIERE D'UN ENFANT


Notre Père des cieux, Père de tout le monde,
De vos petits enfants c'est vous qui prenez soin :
Mais à tant de bontés vous voulez qu'on réponde,
Et qu'on demande aussi, dans une foi profonde,
Les choses dont on a besoin.


Vous m'avez tout donné, la vie et la lumière,
Le blé qui fait le pain, les fleurs que j'aime à voir,
Et mon père et ma mère et ma famille entière ;
Mais je n'ai rien pour vous, mon Dieu, que la prière
Que je vous dis matin et soir.


Notre Père des cieux, bénissez ma jeunesse ;
Pour mes parents chéris, je vous prie à genoux ;
Afin qu'ils soient heureux, donnez-moi la sagesse,
Et puisse leur enfant les contenter sans cesse,
Pour être aimé d'eux et de vous !
Mme. Tastu
.......


samedi 12 mai 2012

Aurora cælum purpurat...




L'aurore empourpre le ciel,
L'air retentit de louanges,
Le monde triomphant jubile,
L'enfer épouvanté frémit,
A l'heure où ce Roi des forts,
De l'infernal antre de la mort,
Ramène libéré, le sénat de nos pères,
A la joyeuse lumière de la vie.

A son sépulcre, nombreuse
Était la garde scellant la pierre
Vainqueur, il triomphe et sa tombe
Devient la tombe de la mort.

Assez de deuil, assez de larmes,
Assez de temps à la douleur ;
Il est ressuscité, le triomphateur de la mort,
Il nous le crie, l'éclat de l'ange.
Pour être éternellement aux âmes,
Leur joie pascale, ô Jésus ;
De la cruelle mort du péché,
Délivre les régénérés.

A Dieu le Père soit la gloire,
Et au Fils qui, d'entre les morts,
Est ressuscité, ainsi qu'au Paraclet,
Dans les siècles éternels. Ainsi soit-il.


In resurrectione tua, Christe, alleluia.
Cæli et terra lætentur, alleluia.


Hymne des Laudes pour le temps pascal, 
traduite du bréviaire romain.

jeudi 19 avril 2012

Cantate Domino canticum novum !



Chantez  maintenant, ô vous, fils et filles de Jérusalem
Car l'empire de satan est fini à jamais
Et la citadelle dolente est jetée à bas.

Chantez et réjouissez-vous, ô vous, peuple de Sion,
Car votre guet n'a pas été vain,
Et la porte noire est brisée ;
Votre Roi l'a franchie,
Et il est vainqueur de la mort.

Chantez et soyez dans la joie, ô vous, enfants d'Israël,
Car votre Roi reviendra,
Et Il réside parmi vous
Tous les jours de votre vie.

Et la Race qui fut desséchée sera renouvelée
Et Il la plantera dans les hauts lieux,
Et la Cité des élus sera éternelle et bienheureuse.

Chantez, ô vous tous, un cantique nouveau au Seigneur,
Car Il a opéré des merveilles !

jeudi 8 mars 2012

Tout est grâce !




Tout est grâce !


Quand l'été vient, le pauvre adore !
L'été, c'est la saison du feu
C'est l'air tiède et la fraîche aurore,
L'été, c'est le regard de Dieu.
L'été, la nature éveillée
Partout se répand en tous sens,
Sur l'arbre en épaisse feuillée,
Sur l'homme en bienfaits caressants.


Tout ombrage alors semble dire :
Voyageur, viens te reposer !
Elle met dans l'aube un sourire,
Elle met dans l'onde un baiser.
Elle donne vie et pensée
Aux pauvres de l'hiver sauvés,
Du soleil à pleine rosée,
Et le ciel pur qui dit : vivez.


Alors l'âme du pauvre est pleine :
Humble il bénit ce Dieu lointain,
Dont il sent la céleste haleine
Dans tous les souffles du matin.
L'air le réchauffe et le pénètre,
Il fête le printemps vainqueur,
Car l'oiseau chante à sa fenêtre,
La gaîté chante dans son cœur.


Alors si l'orphelin s'éveille
Sans toit, sans mère en priant Dieu,
Une voix lui dit à l'oreille :
« Eh bien, viens sous mon dôme bleu !
Viens j'ai des fruits d'or, j'ai des roses,
J'en remplirai tes petits bras ;
Je te dirai de douces choses
Et peut-être tu souriras.


Je voudrais te voir sourire,
Pauvre enfant si triste et si beau,
Et puis tout bas j'irai le dire
A ta mère dans son tombeau.
J'ai souvent pensé dans mes rêves
Que la nature du front sacré
Dédiait tout bas ses merveilles
A ceux qui l'hiver ont pleuré.


Pour tous et pour le méchant même
Elle est bonne, Dieu le permet,
Dieu le veut, mais surtout elle aime
Le pauvre que Jésus aimait !
A-t-il faim ? au fruit de la branche
Elle dit : — Tombe, fruit vermeil !
A-t-il soif ? — Que l'onde s'épanche !
A-t-il froid ? — Lève-ton, soleil !


Lorsqu'il est temps que l'été meure
Sous l'hiver sombre et solennel,
Même à travers le ciel qui pleure
On voit un sourire éternel,
Car sur les familles souffrantes
L'hiver, l'été, la nuit, le jour,
Avec des cornes différentes
Dieu verse à grands flots son amour.


Quand la nature paraît morte
De l'hiver sous la dure loi,
Du pauvre un ange ouvre la porte
Et lui dit en entrant : C'est moi !
Je suis la charité, l'amie
Qui se réveille avant le jour
Quand la nature est endormie,
Et que Dieu m'a dit : A ton tour !


Je viens visiter la chaumière
Veuve de l'été si charmant,
Je suis fille de la prière,
J'ai des mains qu'on ouvre aisément,
J'accours, car la saison est dure !
J'accours, car l'indigent a froit !
J'accours, car la tiède verdure
Ne fait plus d'ombre sur le toit.


Je prie, et jamais je n'ordonne.
Chère à tout homme, quel qu'il soit,
Je laisse la joie à qui donne
Et je l'apporte à qui reçoit.
O figure auguste et modeste
Où le Seigneur mêle pour nous
Ce que l'ange a de plus céleste,
Ce que la femme a de plus doux.

Poème anonyme.

vendredi 18 novembre 2011

Rêverie







Alors que sur les monts l'ombre s'est abaissée,
Des jours qui ne sont plus s'éveille la pensée;
Le temps fuit plus rapide; il entraîne sans bruit
Le cortège léger des heures de la nuit.
Un songe consolant rend au cœur solitaire
Tous les biens qui jadis l'attachaient à la terre.
Ses premiers sentiments et ses premiers amis,
Et les jours de bonheur qui lui furent promis.
Calme d'un âge heureux, pure et sainte ignorance,
Amitié si puissante, et toi, belle espérance,
Deux trésors qui jamais ne me seront rendus.
Ah ! peut-on vivre encore et vous avoir perdus !

lundi 14 novembre 2011

Une noce au village



La cloche de ses joyeux sons
Remplit le village et la plaine.
C'est la noce de Madeleine
Avec Jean, le roi des garçons.

Leurs simples habits sont en laine,
Aux champs on y va sans façons,
Mais leurs âmes innocentes sont pleines
D'amour, d'espoir et de chansons.

Ils ont pour entrer en ménage,
Elle, ses doigts, son gai courage,
Son âme et son visage en fleur;

Lui, son amour, sa bonne mine,
Ses bras vaillants, son vaillant cœur,
Et tous deux la grâce divine.

Anatole de Ségur

dimanche 23 octobre 2011

Heureux l'homme occupé de l'éternel destin !



Heureux l'homme, occupé de l'éternel destin,
Qui, tel qu'un voyageur qui part de grand matin,
Se réveille, l'esprit rempli de rêverie,
Et dès l'aube du jour se met à lire et prie !
A mesure qu'il lit, le jour vient lentement
Et se fait dans son âme ainsi qu'au firmament.

Il voit distinctement, à cette clarté blême,
Des choses dans sa chambre et d'autres en lui-même;
Tout dort dans la maison; il est seul, il le croit,
Et cependant, fermant leur bouche de leur doigt,
Derrière lui, tandis que l'extase l'enivre;
Les anges souriants se penchent sur son livre.

Victor Hugo