e succès ici-bas n'appartient pas toujours aux justes, et il ne justifie jamais le coupable, voilà la vérité. Après l'avoir constaté, après avoir établi fermement qu'il faut estimer les choses humaines par la morale et non par le profit, il est consolant de pouvoir ajouter, qu'en thèse générale et malgré des exceptions éclatantes, c'est la cause juste qui réussit. La Providence permet parfois le triomphe du mal pour que nous ne puissions douter de la vie à venir (déjà qu'avec toutes ses misères, les hommes ne cessent pas de s'enchaîner au monde, alors sans...), et pour que nous apprenions à nous attacher uniquement à la justice et non pas à ses récompenses (tel est le propos global du Livre de Job), mais gardons-nous de prendre l'exception pour la règle et de fournir une excuse aux âmes faibles en proclamant le divorce éternel du succès et de la vertu. Ne disons pas que le succès a pour condition nécessaire l'injustice, afin de trouver dans cette prétendue nécessité le prétexte d'une nouvelle morale qui ne serait que la négation de la morale, car c'est là non seulement un crime contre la vertu, mais encore une bêtise.
Le plus grand de tous les vaincus, n'est-ce pas Jésus-Christ crucifié ? Les fidèles, qui pleurent au pied de sa croix, croient-ils que tout soit fini avec sa mort ? ils pleurent, mais cette défaite est le plus grand de tous les triomphes de l'univers. La persécution des chrétiens commence à cette croix et dure quatre siècles dans ces prétoires où les apôtres sont traînés les mains liées, dans ces cachots où ils luttent contre la faim, dans ces arènes où on les expose aux bêtes, dans ces catacombes où ils cachent leurs mystères et leurs espérances ; croient-ils donc que le Christ vaincu parce qu'il mourut ? attendez encore et vous allez voir luire la première aurore de la victoire, qui sera saluée dans le monde par des cris de joie ; ce triomphe n'arrive qu'après plusieurs siècles, il coûte du sang, mais il est magnifique et il établit son règne sur toute la terre. Pareillement pour nous, à titre individuel ou collectif, les tribulations du siècle ne sont qu'un état temporaire, dont on ne saurait se plaindre, car cent ans de peines est un prix fort modeste pour une éternité de gloire. Celui qui sème dans la douleur récoltera dans l'allégresse !
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